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27 octobre 2008 1 27 /10 /octobre /2008 08:29

Le présent bilan se lit  en "rouge" commentant et enrichissant le projet initial (en "jaune") -dont dispose chacun(e) des participants-.

UMA / VINATIER / LYON 



I/ OBJECTIFS


Les personnels œuvrant en H.P. ont souvent à affronter des actes de violence: symbolique ou réelle, subie et/ou spectaculaire, sourde ou tonique, elle blesse toujours. 

Certes, tous les intervenants soignants et non soignants ("tous": l'originalité et sans doute un des facteurs les plus positifs de cette formation consiste en ce que tous les personnels -soignants & administratifs- y ont activement participé, ce qui a permis un libre "jeu" des "postures" dans la prise de décision d'un groupe tenté par la sidération.: à l'évidence les groupes formés selon la stratification hiérarchique sont moins attentifs à l'implication de chacun) ont acquis empiriquement, en plus de leur formation, un savoir et un savoir faire, souvent décrits comme “intuition”, “feeling”, “expérience”, voire “talent individuel”.

On remarque que cette connaissance "empirique" a une mémoire relativement courte, faute de discours "mythologique" ("culture d'entreprise") transmise par les "ancien(ne)s" aux nouveaux/elles arrivant(e)s, faute d'une mise en œuvre de tels discours ("Livre d'or" des incidents, non pas en PV mais avec toute la richesse parfois épique de l'affect)

Il est cependant possible d’aborder ces situations avec plus d’objectivation, en repérant, clarifiant et classifiant les signes “classiques” de violence, ainsi que les réponses adéquates.

Les groupes, toniques et motivés, ont fait preuve d'attention, d'intelligence et d'esprit critique:

- l'objectivation est:  - aisée en ce qui concerne l'Autre (le patient violent et/ou l'Institution)
- plus difficultueuse en ce qui concerne sa propre pratique (hypothèse: les "victimes" d'acte de violence sont contaminées par une culpabilité sournoise, comme si elles avaient professionnellement "failli"; manifestement un travail reste à faire pour déculpabiliser (prise en charge systématique par l'Institution des suites juridiques, Instance permettant l'abréaction, suivi psychologique, restauration des images narcissiques, prise en charge collective des incidents, réflexion collective sur des propositions effectivement prises en compte)

 

Il s’agit de pouvoir repérer des paramètres précis, d’en analyser l’occurence (dans le service même et ailleurs, y compris tels que l’iconographie les traite), de formaliser autant que faire se peut les réponses individuelles, collectives et institutionnelles, et de s’entraîner à les appliquer in vitro.



II/ MISE EN ŒUVRE


1/ Élaboration d’une “Histoire des actes violents” dans le service et ailleurs (expérience de tous/toutes) 

a) récit, mise en commun des expériences (fichier, “mémoire”, cahier, etc...)

Les récits sont restés oraux, à la fois par manque de temps et parce que, comme de coutume, un certain "positivisme" professionnel a tendance à faciliter l'amnésie-déni des "incidents" confusément pensés comme des "failles" de compétence; ainsi, une certaine gêne empêche, malgré une parole libre, de dire immédiatement  "avec quel type de malades on est le moins à l'aise", comme si le "malaise" allait être interprété comme "incompétence". 

Cela dit, les groupes ont aisément franchi ce pas, ce qui est rare et témoigne d'une dynamique de groupe riche et  tonique.


b) mise en scène, (technique “Boal”: jeux de rôles, “théâtre images” illustrant les scènes les plus intolérables, “théâtre forum” permettant des issues alternatives, changement de personnages, etc...)

Les participants ont investi les exercices avec une énergie parfois considérable, réduisant ainsi l'espace entre la simulation & la réalité, permettant ainsi la compréhension fine que le patient violent lui aussi peut "jouer" un scénario, en choisissant un système de codes qu'il possède mieux que les soignants (insulte, gestuel de combat, perversité...)

Le "réalisme" de certaines scènes a permis de travailler sur ce que peuvent ressentir l'agresseur et/ou l'agressé face à des injonctions, à des manœuvres d'immobilisation et de contention: la mise en œuvre de gestes moins invasifs en a donc été facilitée.

Cependant il est difficile pour certain(e)s de se laisser aller à une théâtralité d'agression & d'oppression, comme si le signe théâtral du personnage était trop contigu à la personne elle-même.



2/ repérage et protocole de description: analyse de la sidération

La "sidération" a été envisagée sous son triple aspect:

- incapacité à analyser rapidement ce qui se passe (d'où la nécessité à s'apprivoiser au discontinu, à l'inopiné, à ce qui transcende le dispositif -le "hors dimensionnement"-)

-  incapacité à trouver les opérations nécessaires, la culture & l'intelligence inhibées par l'émotion (elle même originée peut-être à des traumas archaïques...)

- "voyeurisme" sadique (certain(e)s ont eu quelques difficultés à l'admettre..)

 

a) les signes annonciateurs (verbaux, non verbaux) et leur évolution:

- patient

- personnel soignant

- topologie

Rapidement émerge l'idée que les situations de violence correspondent à des SITUATIONS DE FLOU:

- flou institutionnel: changement d'équipe, hésitation quant à la responsabilité d'une décision,...

- flou décisionnel: limite de protocole

- flou gestuel: ambiguïté des mouvements, des postures, hiatus entre parole & gestuel, ou entre libellé et énonciation (exercice pratiqué: "entendre" un discours d'abord en tant que voix, puis "sans bande son"...)


b) les blessures (pour tous!)

- geste, comportement, procédure

- mots, insultes, humiliations

Le travail sur l'insulte & les blessures est resté superficiel, faute de temps: un échange soutenu et continu permettrait à chacun(e) - de repérer ses propres blessures, en ce qu'elles font écho à des blessures archaïques -humiliations familiales, agressions, etc...-, et que la régression consécutive à la violence subie font émerger en "sidération"

- de les DIRE, autant que faire se peut, à autrui, pour esquiver une situation potentiellement traumatisante


c) les processus de théâtralité et leur paradigmes

- idéologiques (archétypes cinématographiques, iconographiques) - personnels (scènes archaïques d’oppression: repérage de ses propres peurs / positions inconscientes dans le groupe)

Tou(te)s ont eu quelques difficultés à examiner et à verbaliser le type de projection que leur phénotype et leur emblématique ("look") induisent généralement.

L'humour a cependant permis de repérer certaines évidences: 

- certain(e)s jouent fort bien de cette théâtralité, alors que d'autres s'en méfient, la dénient (et/ou en souffrent?)

- la "masculinité" (d'aucun(e) diraient "le machisme") induit des projections cinématographiques du type "Rambo" ou "Sauveur", qui peuvent induire à leur tour ou renforcer la violence...d'où l'intérêt de constituer des groupes MIXTES autorisant tous les types de projection.


L'accent a été mis sur le fait que:

- il est toujours possible de maîtriser voire de subvertir ces emblématiques, par un gestuel et une parole maîtrisés

- le groupe peut intelligemment jouer de ces emblématiques (ex: auprès de quel personnage un patient va-t-il quêter Loi, protection, connivence complice?...)


Faute de temps, nous nous sommes contentés d'aborder sommairement les paradigmes théâtraux: souhaitons que cette sensibilisation permet de reconnaître qu'un patient (et aussi qu'un... Institutionnel...) rejoue "la scène du II" dont il sait (expérience personnelle et/ou film ou feuilleton télévisé) qu'elle a quelque efficacité. Une étude plus longue impliquerait une analyse sémiologique des schèmes d'agression, par exemple en décortiquant des images cinématographiques.



3) analyse & jeu théâtral:


a) les paramètres qui engendrent & accroissent la violence

- gestuel

- comportements verbaux et non verbaux

- topologie (confinement/ouverture, etc...)

- comportement institutionnel (flou, doute, etc...)

Les participants ont "joué le jeu" (cf.II2a), en INSISTANT SUR LE COMPORTEMENT INSTITUTIONNEL: certains groupes ont investi la formation comme "groupe de parole", en redondance avec la Supervision en œuvre par ailleurs: les interventions ont débouché sur un complément de formation: éléments d'Analyse Institutionnelle (essentiellement repérage des "positions*" dans le groupe, lieu d'investissements fantasmatiques):


     “Objets” intérieurs                        “Objets” extérieurs


                                   chef institutionnel  - autres  - groupe       monde extérieur

                                                              (individus) (Institution)

a) pos.persécutive:                -**                 -                  -                    +**

(le Rebelle)

b) défense maniaque:             +                    +                    +                   -

(le Fanatique)

c) pos. dépressive:                  +                  -                      -                    +/-

(le Chouchou)

d) défense hystérique:            -                  +                      -                    +/-

(le Copain)


*: qu’elles deviennent “postures” volontaires...

**: +/-:  discours laudatifs & péjoratifs "projetés" sur autrui et l'Institution, 


Les analyses, sommaires faute de temps, ont permis semble-t-il la compréhension fine des divers systèmes de projection qui traversent un groupe, et dont les quatre schèmes principaux sont nécessaires, faute de quoi le groupe dérive & meurt....


b) les paramètres qui calment & canalisent la violence

- signifier la Loi (schèmes verbaux & non verbaux)

- maîtriser les rythmes (acmé, puis ralentissement)

- mettre en place d’une “issue symbolique” (parole, gestuel)

Le savoir-faire des participants est évident, malgré tout il y a difficulté à signifier la Loi sans emprunter à la théâtralité de l'agression ou de la séduction, ce qui prête à la confusion, voire à la perversité. Il semble que la "culture" des "soignants"  (réputés comme par essence "bienveillants" et "sains") soit parfois une gêne pour être l'expression coercitive de la Loi qui, exprimée trop tard, est trop colorée d'affect, d'humeur personnelle et caractérielle.

Une difficulté subsiste à maîtriser les discontinus, plus précisément à les signifier au patient ou aux membres de l'équipe: tout se passe comme si les personnes étaient soumises à l'inertie des personnages (ex: redevenir "soignant" après avoir été coercitif, calme après avoir été énergique)




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